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Soutien à la parentalité des personnes en situation de handicap : ça avance

Longs FormatsSophie LE GALL15 mai 2025
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De nouveaux dispositifs de soutien à la parentalité portent en eux l’espoir d’une accélération de cette politique publique. Sur le terrain, l’urgence est - en particulier concernant le handicap psychique et la déficience intellectuelle - à l’interconnaissance entre les secteurs du handicap et de la protection de l’enfance.

Les personnes en situation de handicap qui souhaitent devenir parents ou qui le sont ont longtemps représenté un impensé. « De la même façon que l’on n’avait pas pensé qu’elles vieilliraient, on n’avait pas pensé qu’elles pourraient avoir une sexualité ou encore des enfants. Elles vont plus vite que nous et que la loi, qui essaye de les rattraper ! », analyse Catherine Realland, responsable du service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) Bassin Rennais, de l’Adapei 35 (Ille-et-Vilaine). 

« Ces parents disent : "Nous sommes là, c’est comme ça !", à la société et à nous qui sommes leurs propres parents, pas toujours ravis, il faut le dire, à l’annonce d’un projet de grossesse », confie Bernard Hondermarck, président de l’APEI Seine & Mer (Dieppe).

Prouver davantage 

Jane Meuke, fondatrice de l’association Action Visible et Handicap. DR

« Nous représentons des parents qui doivent prouver davantage alors que nous avons des difficultés, nous sommes piégés par des injonctions contradictoires », témoigne Jane Meuke, fondatrice de l’association Action Visible et Handicap (Lyon), qui aimerait que l’approche des pouvoirs publics « se traduise par un accompagnement de la famille dans sa globalité et non circonscrit à la personne en situation de handicap ». 

Combien sont ces familles ? Les chiffres font défaut alors que la France, en ratifiant la convention internationale des droits des personnes handicapées (CIDPH) en 2010, s’était, notamment, engagée à produire davantage d’éléments chiffrés sur le sujet.

Ce que dit la loi

La loi affirme et réaffirme le droit à la vie affective, à la vie sexuelle et la parentalité : de celle du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, incitant les établissements et services à s’engager dans un accompagnement, à la loi de 2005, jusqu'à, plus récemment, la circulaire du 5 juillet 2021 relative au respect de l’intimité, des droits sexuels et reproductifs des personnes accompagnées.

Par ailleurs, depuis la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, les personnes handicapées sous mesures de tutelle ou de curatelle peuvent élever leurs enfants. L’adoption est ouverte, en théorie, aux candidats en situation de handicap. Et la France a donc ratifié, en 2010, la CIDPH, qui rappelle que les personnes en situation de handicap ont le droit de se marier, de fonder une famille et d’avoir des enfants. 

Ce qui se fait

Dans les faits, l’accès à l’intimité ou à la vie de couple en établissement n’est toujours pas acquis, donnant lieu à des situations complexes, et trop souvent, en bout de parcours, à des placements d’enfants à la naissance. « Quand une jeune femme qui vit en établissement déclare sa grossesse, elle doit quitter l’établissement, qui n’est pas habilité à accueillir des mineurs, et surtout, pas préparé à l’accompagner », relève ainsi Sophie Dupas Lesaulnier, responsable du dispositif Cap Parents Pays de la Loire.

Même en dehors des établissements, les personnes en situation de handicap psychique et mental ne sont pas toujours libres de leur sexualité comme de leur contraception, notamment par manque de professionnels formés à leur écoute et en raison du contrôle exercé par leur famille.

Nouvel élan

Des services d’accompagnement à la parentalité des personnes en situation de handicap (SAPPH) (ici à Paris) se sont développés sur certains territoires. Denis Meyer / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Pour autant, les choses bougent, et des dispositifs se développent pour prévenir et accompagner les difficultés. Parents et futurs parents peuvent ainsi être accompagnés au sein des services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) - qui, pour certains, ont développé un volet « accompagnement à la parentalité » - mais aussi par des services d’accompagnement et de soutien la parentalité (SASP), et, dans certaines régions, par des services d’accompagnement à la parentalité des personnes en situation de handicap (SAPPH). 

Sans oublier l'appui possible de techniciennes de l’intervention sociale et familiale (TISF) et de professionnels de l’aide à domicile, selon le plan d’aide mis en place dans le cadre de la prestation de compensation du handicap (PCH). Celle-ci couvre en effet, depuis le 1er janvier 2021, les besoins liés à la parentalité des personnes handicapées. Au 1er janvier 2023, suite à une forte mobilisation associative, son bénéfice a en outre été élargi aux personnes ayant des troubles mentaux, psychiques, cognitifs ou du neurodéveloppement.

Intimagir

Par ailleurs, les centres de planning familial accueillent ce public spécifique (programme Handicap et alors ? ). Le Grenelle des violences conjugales (en 2019) conjugué au chantier national des « 1 000 premiers jours » de l’enfant, en 2020, a permis d’aboutir, en 2023, à la mise en place, à l’échelle régionale, des centres ressources Intimagir. Ceux-ci ont pour double objectif d'informer et de conseiller sur les problématiques liées à la vie affective et sexuelle des personnes en situation de handicap, ainsi que sur leur parentalité, et de lutter contre les violences faites à ce public (les femmes en situation de handicap sont deux fois plus nombreuses à subir des violences sexistes et sexuelles). 

« Notre volonté est de donner une information fiable aux personnes vulnérables, dans un langage simplifié. Les réseaux sociaux peuvent les mettre dans des situations dangereuses », témoigne Clarisse Métayer, cheffe de projet du centre Ressource Intimagir Bretagne, porté par l’association Breizh Santé Handicap.

Cap Parents

Le dispositif Cap Parents a été lancé en 2024, il vient remplacer les SAPPH dans certains territoires. Getty images

Le comité interministériel du handicap de novembre (CIH) de 2020 a, quant à lui, abouti au lancement, en 2024, du dispositif Cap Parents, ouvert à tout type de handicap, animé par des associations du secteur du handicap sur appel à candidatures des agences régionales de santé (ARS).