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Tribune libre23 juin 2025
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Management, évaluation, contrôle : à chacun son rôle !

La qualité de l'accompagnement dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) n’étant pas une option, il appartient à chacun – manager, évaluateur, contrôleur – de s'en préoccuper, plaide dans cette tribune libre* Christian Saout, membre de la Haute autorité de santé (HAS).

La qualité des accompagnements dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) est un dû pour ceux qui y sont accueillis. Parce qu’il s’agit d’abord de dignité des personnes, mais aussi d’argent public et de missions de service public.

Pourtant, en 2024, seuls 19 % des ESSMS évalués maîtrisaient les 18 critères impératifs de l’évaluation externe obligatoire pilotée par la Haute autorité de santé (HAS). C’est dire la marge de progression.

Chacun doit donc se préoccuper de la qualité. Depuis la place qu’il occupe : manager, évaluateur, contrôleur.

Manager la qualité

C’est l’affaire des gouvernances et des directions qui doivent inscrire une stratégie d’amélioration continue de la qualité dans leur projet d’établissement ou de service et se doter de services dédiés ou recourir à des accompagnements extérieurs.

Pour soutenir leurs stratégies d’amélioration continue de la qualité, ils peuvent utiliser le cahier des charges de l’évaluation publié par la HAS : nombreux sont ceux et celles qui y recourent à titre « d’entraînement » ou de diagnostic.

En outre, de nombreuses recommandations de bonnes pratiques couvrant l’ensemble des accueils et accompagnements des ESSMS ont été produites et actualisées par la HAS. Ils constituent des optimums de qualité attendus par les personnes accueillies, leurs familles et leurs proches.

Elles contiennent l’état de l’art tel qu’il ressort des publications nationales ou internationales et des résultats éprouvés obtenus par des pratiques documentées. Ce sont autant d’outils au service du management de la qualité. D’autant que le manuel d’évaluation et les critères qu’il contient sont liés à ces recommandations.

Évaluer la qualité

L’évaluation interne est toujours possible, par le truchement d’organismes mandatés et financés par les ESSMS eux-mêmes. Elle revêt parfois l’appellation de certification.

S’il n’y a plus de correspondance entre ces certifications privées et l’évaluation publique opérée par la HAS, il n’est pas douteux qu’elles contribuent à l’amélioration de la qualité de l’offre.

À la différence des certifications privées, l’évaluation externe, légalement obligatoire une fois tous les cinq ans, repose sur une méthode rigoureuse publiée par la HAS sur la base de critères répartis entre une partie impérative (18 critères) et une partie dite « standard » (139 critères).

Cette évaluation a été confiée à des organismes évaluateurs qui doivent s’y référer et être accrédités par le Comité français d’accréditation (Cofrac).

Les premières évaluations, déployées en 2023 et 2024, se sont plutôt déroulées sans heurts… Même si la HAS a bien conscience des efforts qui restent à accomplir. Car avant de devenir routinier, tout système d’évaluation offre des prises à la critique.

Certains raillent une cotation infantilisante. D’autres se plaignent de certains évaluateurs dont la posture relève plus du contrôle de procédures que de la dynamique d’évaluation. D’autres encore estiment que le temps consacré aux accompagnés traceurs, ou leur nombre, sont insuffisants.

Dans ces critiques tout ne relève pas de la responsabilité de la HAS, loin s’en faut. Elle s’est attachée dans une délibération récente à corriger ce qui lui incombait.

Contrôler les établissements et services

Certaines critiques – au motif que la charte de l’expertise à laquelle est astreinte la HAS ou que l’accréditation du Cofrac se réfère à des normes d’inspection – assimilent l’évaluation opérée par la HAS à un contrôle. Il n’en est rien.

Le contrôle, via des inspections sur place le cas échéant, car il en existe aussi sur pièces, est sous la responsabilité des autorités publiques (État, régions, départements, communes) qui réglementent, autorisent et financent le fonctionnement des ESSMS.

Elles sont légitimes à regarder comment les financements abondant les établissements et services sont utilisés, à vérifier que la réalité des missions et des actions accomplies répond au périmètre de l’autorisation et plus généralement à s’inquiéter que les réglementations édictées pour la protection des personnes accueillies et accompagnées soient respectées.

C’est ce qui vient d’être entrepris par les contrôles en cours sur l’ensemble des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad) à l’initiative de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

Trois piliers de la qualité à conforter sans retenue !

Manager, évaluer et contrôler constituent donc trois instances distinctes d’une stratégie d’amélioration de la qualité. Elles s’articulent entre elles et devraient trouver un soutien plus ferme :

  • En faisant en sorte que l’amélioration continue de la qualité – ses fondements, ses objectifs, ses modalités – soit enseignée dans les établissements de formation des directeurs d’ESSMS et dans les écoles de travailleurs sociaux.
  • En déployant des plans de contrôles réguliers entre autorités de tarification et de réglementation de sorte que le doute qui s’est installé dans l’opinion à l’égard des ESSMS ouvre vers une confiance retrouvée pour les personnes accueillies et accompagnées, leurs familles et leurs proches.
  • En poursuivant et en améliorant la réforme de l’évaluation publique obligatoire pilotée par la HAS, dont des ajustements seront apportés par la HAS et le régulateur public le cas échéant. Une fois encore, un nouveau modèle d’évaluation publique se met en place : il n’est pas anormal qu’il suscite des interrogations et justifie des ajustements.

Cette clarification des rôles des uns et des autres, et leur renforcement, apparaît aujourd’hui indispensable. Aucun établissement ou aucun service ne devrait être dans la crainte devant ces outils qui constituent autant de garanties pour les personnes accueillies et accompagnées.

La publication d’une feuille de route de l’amélioration de la qualité des ESSMS aiderait l’ensemble des acteurs à s’y retrouver.

Il en va de la qualité des actions et des services offerts aux personnes qui relèvent de l’action sociale et médico-sociale, de la qualité budgétaire ce qui n’est pas rien au moment où la Nation doit faire des choix courageux, et du pouvoir d’agir des personnes concernées qui est au cœur de la démocratie en santé.

* Les tribunes libres sont rédigées sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas la rédaction du Media Social.

ChristianSAOUT
Membre du collège de la Haute autorité de santé (HAS), président de la commission sociale et médico-sociale (CSMS) et de la commission pour la participation et l’engagement des personnes (CPEP).
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