Camille, diplômée assistante de service social en 2008, se souvient : « À l’époque, tout le monde voulait travailler en protection de l’enfance. Aujourd’hui, tout le monde s’en va… ». La jeune femme, qui exerce en protection de l'enfance, déplore manquer de réponses face aux besoins des jeunes qu'elle suit. Elle évite désormais, à contrecœur, de leur promettre une solution.

De son côté, Raphaël, travailleur social auprès de femmes victimes de violences, soupire : « On se retrouve à défendre les nuitées en hôtel alors qu’on en dénonçait les conditions. Mais c’est toujours mieux qu’un féminicide… » Sophie, assistante de service social dans le Nord, voit elle aussi son seuil d’acceptation monter : « On banalise les familles avec enfants à la rue. On sait qu’un placement va être maltraitant, avec un enfant baladé de foyer en foyer. » Elle observe certains collègues se résigner ou se refermer, pour moins subir l’impuissance.

Trois professionnels parmi d'autres, qui incarnent les dilemmes rencontrés par des milliers de leurs collègues, forcés de jongler entre la pression des financeurs, la gestion d'urgences devenues systématiques, l'inflation des procédures et des écrits, et, en face, les attentes de publics dont la détresse s'aggrave à force de n'être pas prise en compte.

Comment poursuivre sa mission dans un tel contexte ? Se résigner ou s'épuiser en combats souvent inutiles ? Appliquer les règles ou s'autoriser des contournements pour préserver son éthique et sa foi dans le métier ? Certains tranchent en quittant le secteur, d'autres s'accrochent en s'appuyant sur une hiérarchie soutenante, un collectif de collègues, mais aussi en recourant au droit face aux injonctions.

Pour lire l'intégralité de notre dossier long format sur le sujet, c'est par ici : ⇒ « Travail social : les professionnels sur la corde raide »