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Article11 mai 2020
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Covid-19 : les CCAS se préparent à amortir "l'appauvrissement général"

Depuis plusieurs jours, et avant que le Premier ministre déclare redouter un "appauvrissement général" du pays, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS), qui ont vu venir à eux de nouveaux publics précarisés, imaginent des dispositifs pour répondre à la crise sociale.

« Il y a quelques jours, on a commencé à distribuer des masques aux plus fragiles. À partir du 11 mai, on active le plan VIC 19, pour Vernouillet initiative Covid », annonce Éric Steiner, directeur du centre communal d'action sociale (CCAS) de Vernouillet, commune d'Eure-et-Loir (12 500 habitants), qui compte environ 30 % de population en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

Avec VIC 19, le directeur entend adapter son CCAS à la réalité engendrée par la crise sanitaire, qui a déjà fait le lit, selon ses observations de terrain, d'une crise sociale. « Notre épicerie sociale, qui est dédiée au public que nous suivons au titre du RSA, a enregistré une augmentation de sa fréquentation de plus de 20 %, avec, dans le même temps, des personnes qui, elles, sont sorties de nos radars », explique-t-il.

De nouveaux publics pour les CCAS

Dans le cadre du plan VIC 19, le CCAS va réviser son barème d'accès à l'épicerie pour l'ouvrir à des foyers qui ont des revenus supérieurs aux revenus sociaux mais que la crise a fait basculer – salaires diminués, arrêt de l'intérim, pause de l'économie informelle… – dans la précarité.

Éric Steiner, directeur du CCAS de Vernouillet (28)

Plus généralement, le CCAS veut « accueillir et informer le maximum de personnes en difficulté » sur ses propres dispositifs et celles de ses partenaires (conseil départemental, CAF…), un accueil d'autant plus important que « certains opérateurs, comme Pôle emploi, vont être certainement débordés », estime le directeur. Le CCAS a ainsi communiqué à l'ensemble de la population par voie de tract déposé dans les boîtes aux lettres, « une communication simplifiée pour contourner les difficultés de maîtrise de la langue française » et a mis en place un accueil transversal avec les deux centres sociaux communaux, qui, « certes, ne disposent pas de travailleurs sociaux, mais permettent d'assurer sur plusieurs sites une première orientation », détaille-t-il.

Le CCAS va également sortir du périmètre strictement social pour se rapprocher des acteurs de l'insertion par l'emploi et des employeurs afin d'identifier des offres d'emploi non apparentes. « Si on peut mettre en relation l'offre et la demande, ce sera déjà bien », commente le directeur. Enfin, Éric Steiner aimerait ouvrir un lieu de convivialité pour les personnes qui se seraient beaucoup repliées sur elles-mêmes et qui ont « avant tout besoin de recréer du lien social ».

Bien positionner les travailleurs sociaux

Dans une tout autre configuration que Vernouillet, sur le territoire rural du Grand Autunois Morvan (Saône-et-Loire, 36 300 habitants), Carole Mongouachon, la directrice du centre intercommunal d'action sociale (CIAS), s'appuie sur le plan de continuité d'activité (PCA) de son établissement pour imaginer l'ouverture progressive de ses différents services accueillant du public. « Nous ne comptons que deux travailleurs sociaux, il faut donc les positionner sur les priorités des priorités », précise-t-elle.

Si la fréquentation des épiceries sociales intercommunales n'a pas explosé, le CIAS a été alerté par les associations du secteur de l'aide alimentaire, qui, elles, ont à faire face à une forte demande. De son côté, le CIAS a diffusé les chèques d'urgence alimentaire mis en place fin avril 2020 par le gouvernement. « Ces chèques ne sont pas venus jusqu'à nous, il a fallu se manifester auprès de la direction départementale de la cohésion des territoires », commente Carole Mongouachon, « et ensuite, nous avons pu les distribuer à des personnes SDF hébergées dans un centre de confinement et à des jeunes mineurs non accompagnées (MNA) accueillis dans un foyer ».

Soutenir les personnes âgées désorientées

Passé le temps de l'urgence, la directrice s'inquiète aujourd'hui pour « une hausse prévisible des demandes d'aide liées à la mobilité, problématique très forte en territoire rural, par exemple, pour payer l'assurance voiture », et pour les personnes âgées qui ont « décroché » avec le confinement. Le pôle personnes âgées du CIAS est intervenu auprès de personnes désorientées, exprimant des envies de suicide. « Nous ne pouvions jusqu'alors leur proposer que du soutien par téléphone, et les aides à domicile, qui sont de précieux relais, avaient réduit leurs interventions aux gestes essentiels. Désormais, nous allons pouvoir recommencer progressivement les visites à domicile, et également, compter sur les psychologues et infirmières du réseau de santé du territoire », se félicite la directrice. 

La crise de 2008 s'est fait ressentir pendant trois ans

En écho à ces remontées de terrain, l'Union nationale des CCAS et CIAS (Unccas), communique très régulièrement afin de favoriser l'échange d'expériences et entend accompagner ses adhérents dans les défis qui les attendent dans les mois et même les années à venir. « Les conséquences sociales de la crise de 2008 se sont fait ressentir pendant trois ans », rappelle Benoît Calmels, son délégué général. L'Unccas a ainsi entrepris, avec le bureau d'études Compas, notamment spécialisé dans la réalisation de l'analyse des besoins sociaux (ABS), outil de pilotage et obligation légale des CCAS et CIAS, de réunir et d'analyser des données sociales actualisées à l'aune de la crise sanitaire et sociale. « Nous allons nous concentrer sur les données concernant des publics particulièrement vulnérables, comme les personnes âgées isolées, et les problématiques les plus aiguës, par exemple la fracture numérique, qui impacte l'accès aux droits, devenu d'autant plus important aujourd'hui », précise le délégué général.

Mettre à jour les priorités en rectifiant les ABS

Avec ces indicateurs, qui devraient être accessibles fin mai 2020, l'Unccas espère aider les CCAS et CIAS à définir très précisément les priorités les plus adaptées à leur territoire et par là même à rectifier leur ABS, mais aussi à « alerter les partenaires institutionnels sur les tendances et l'ampleur de la crise sociale ». Salués plusieurs fois pour leur engagement par le Premier ministre, Édouard Philippe, les CCAS et CIAS ont aussi probablement l'espoir d'être concrètement soutenus par l'État, sachant qu'en avril, ils avaient, en moyenne, déjà distribué plus de 50 % de leurs lignes budgétaires prévues pour les aides facultatives.

SophieLe Gall
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