Depuis le 1er janvier 2025, les Ehpad habilités à l'aide sociale peuvent, selon des modalités aménagées, pratiquer des tarifs différenciés en matière d'hébergement. L'enjeu : générer des ressources supplémentaires en faisant payer davantage certains résidents.
[Dossier juridique mis à jour le 16/07/2025 suite à la mise en ligne, le 10 juillet 2025, d'une « foire aux questions » sur les tarifs hébergement différenciés]
Afin de disposer d’une plus grande marge de manœuvre financière, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) habilités à l’aide sociale peuvent appliquer des tarifs d'hébergement différenciés, selon que les résidents bénéficient ou non de l’aide sociale. Depuis le 1er janvier 2025, cette pratique répond à des conditions assouplies.
Le nouveau cadre de ce mécanisme de différenciation des tarifs est posé par la loi du 8 avril 2024 « portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie » (dite « Bien vieillir »), complétée par un décret du 31 décembre 2024.
En quoi consiste-t-il ? Il autorise les gestionnaires à demander aux résidents ne bénéficiant pas de l’aide sociale à l'hébergement (ASH) de payer un tarif hébergement supérieur – dans une certaine limite – au tarif acquitté par les résidents bénéficiaires de l’ASH.
Ce dispositif doit leur permettre de dégager des ressources supplémentaires. Sachant que fin 2022, 115 000 bénéficiaires de l'aide sociale étaient accueillis en établissement, alors que 519 000 places étaient habilitées à cette même date (autrement dit, environ 22 % des places habilitées sont ainsi occupées par des bénéficiaires de l'ASH), la marge de manœuvre semble assez large.
Si, face aux difficultés financières croissantes, cette mesure peut apporter une bouffée d’oxygène aux gestionnaires, elle apparaît quelque peu comme « un pansement sur une jambe de bois », selon Natalia Breysse, directrice de l’Uriopss Auvergne-Rhône-Alpes. Elle est en outre loin de faire évoluer le modèle économique des Ehpad, ce que réclame le secteur depuis plusieurs années.
Son déploiement sera par ailleurs long : la différenciation des tarifs s’appliquera uniquement aux nouveaux entrants dans l’établissement. Au moins trois ou quatre années seront ainsi nécessaires pour que le dispositif couvre la plus grande partie des résidents non bénéficiaires de l’aide sociale.
Notons que ce dispositif est accompagné de garde-fous pour limiter le risque d’éviction de nouveaux résidents bénéficiaires de l’ASH.
Quelles sont les conditions à remplir pour adopter les tarifs différenciés ? Quels tarifs s’appliquent ? Quels sont les contrôles mis en œuvre par le département ? Les points de vigilance ? Ce dossier juridique fait le point.
1. Établissements concernés
Les Ehpad peuvent opter pour la différenciation des tarifs, et plus généralement les établissements hébergeant des personnes âgées. Aucune condition n’est imposée à part celle d’être habilité à l’aide sociale.
Cette pratique existe depuis une vingtaine d'années, mais elle était peu mise en œuvre, en raison notamment de son cadre contraint (voir le paragraphe ci-dessous « L'ancienne pratique des tarifs différenciés »). Celui-ci est désormais allégé.
Établissements d’hébergement pour personnes âgées
La loi « Bien vieillir » vise, de façon assez large, « les établissements d'hébergement pour personnes âgées mentionnés au 6° du I de l'article L. 312-1 [du code de l’action sociale et des familles] ». À savoir, notamment, les Ehpad, mais également les Ehpa ou les résidences autonomie.
Toutefois, le décret d’application du 31 décembre 2024 cible, dans son intitulé, « les établissements pour personnes âgées dépendantes ». Et dans sa notice, il indique concerner les Ehpad.
Doit-on comprendre que cette mesure s'applique uniquement aux Ehpad ? Ou que les autres établissements pour personnes âgées (Ehpa, résidences autonomie) peuvent également en bénéficier ?
Interrogée, la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a répondu en février 2025 : « La volonté du législateur de mettre en place le tarif différencié dans la loi Bien vieillir et autonomie d’avril 2024 se concentrait sur les Ehpad qui étaient visés par l’article 24. Pour autant, compte tenu de la référence au 6° du I de l'article L. 312-1, l’ensemble des établissements (dont les résidences autonomie) accueillant des personnes âgées est également visé ».
Toutefois, une « foire aux questions » mise en ligne le 10 juillet 2025 précise que les résidences autonomie « ne peuvent (...) pratiquer de tarifs différenciés ». Pour expliquer cette exclusion, l'administration déploie un argumentaire sur l'articulation des articles du code de l'action sociale et des familles entrant en jeu pour l'application du dispositif des tarifs hébergement différenciés. En clair, l'explication se trouve du côté du mode de tarification des résidences autonomie.