Le sujet est porté par les associations accompagnant la grande pauvreté, les avocats de familles dénonçant des placements abusifs et le récent rapport parlementaire d’Isabelle Santiago. Complexe, il interroge à la fois les évolutions du repérage, l’abaissement du seuil de tolérance face aux violences subies par les enfants, les évaluations des travailleurs sociaux et les capacités d’accueil du secteur.
Peut-être n’a-t-il jamais été autant question de « placements abusifs » ou de placements trop nombreux en France. À mesure que la société s’intéresse davantage à la protection de l’enfance, que le secteur se politise et se médiatise, les langues se délient : celles des anciens enfants placés qui ont gagné leur place légitime dans le débat public, mais aussi celles des parents, plus présents sur les réseaux sociaux, accompagnés par des avocats spécialisés ou des associations.
Si le sujet divise, il reste surtout complexe. À commencer par les chiffres : la France serait le « premier pays d’Europe en termes de placements en institution » indique le rapport parlementaire d’Isabelle Santiago. La sociologue et démographe Isabelle Frechon, correspondante nationale du projet de recherche Datacare, initié en 2020 au sein des 27 pays membres de l’Union européenne, invite pourtant à la prudence.
Une position médiane en Europe

« En effectif nous sommes le pays qui place le plus les enfants de 0 à 17 ans, mais nous sommes un grand pays donc il faut le rapporter au nombre d’enfants de cette tranche d’âge, souligne-t-elle. Ainsi nous avons un taux de placement très similaire à celui de l'Allemagne, du Luxembourg ou de la Finlande, et bien en deçà des pays d'Europe de l'Est. Enfin en France les mineurs non accompagnés sont intégrés dans les données, ce qui augmente significativement les chiffres notamment en placements résidentiels. Certains pays les comptent à part et ils n'apparaissent donc pas dans ces calculs ».
Des placements qui augmentent
Personne ne nie toutefois l’augmentation des placements ces dernières années, pour des raisons qui semblent multifactorielles.