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Professionnels du social et du médico-social : alerte rouge sur les recrutements

Longs FormatsAurélie VION19 octobre 2021
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Si le champ social et médico-social a toujours souffert d’un problème d’attractivité, la pandémie de Covid-19 a largement aggravé la donne. Départs, absentéisme, crise des vocations, et, depuis peu, suspensions dues à l’obligation vaccinale… Une situation source de tensions et d'épuisement pour directions et équipes, qui se répercute sur les accompagnements.

« En Haute-Savoie, les problèmes de recrutement existent depuis des années, mais nous vivons aujourd’hui une situation de crise. » Raphaël Miconnet dirige l’association AAPEI Epanou, qui compte actuellement 7 % de postes vacants, soit 30 équivalents temps plein (ETP).

Conséquence de cette pénurie de personnel : les accueils de jour sont fermés, une partie des activités du service d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) n’a pas repris et certains résidents de foyers sont renvoyés temporairement à domicile.

Un minimum de sécurité

Rassemblement, le 16 octobre, face à la préfecture d'Annecy, de 600 personnes, familles et professionnels des associations du département de Haute-Savoie (dont l'AAPEI Epanou), pour exprimer leur désespoir et leurs revendications. Page Facebook- AAPEI Epanou

« Nous le faisons en accord avec les familles et à tour de rôle pour que cela pénalise le moins de personnes, mais la situation est extrêmement inquiétante. Nous devons bien assurer un minimum de sécurité », explique Raphaël Miconnet. Le seul établissement où cette option n’a pas été envisagée est un foyer d’accueil médicalisé (FAM) accueillant des personnes handicapées vieillissantes, un public pour lequel il est bien entendu très délicat de faire appel au soutien familial… 

Comme de nombreuses autres, l'association a participé, le 16 octobre, à un rassemblement organisé à Annecy, afin d'alerter sur l'urgence de la situation et d'obtenir des réponses. 

En mode dégradé

Autre région, autre exemple tout aussi dramatique : en Ile-de-France, une maison d’enfants à caractère social (Mecs) pour laquelle il manque 10 ETP d’éducateurs. « Nous avons recours à des intérimaires mais ce n’est pas satisfaisant. Le turnover n’est pas bon pour les enfants qui ont besoin de stabilité », témoigne Gaël Escaffre, directeur général (DG) de l’Essor, qui a pris la décision de réduire la capacité d’accueil de cette Mecs au début du mois de septembre, passant de 40 à 30 places.

« Après le creux de l’été, nous n’avons pas pris de nouveaux enfants et nous avons fermé l’une des quatre unités », précise le DG, qui se dit contraint de faire des prises en charge dégradées dans plusieurs établissements et services, aussi bien du champ de la protection de l’enfance que du handicap.

La goutte d'eau

Gaël Escaffre, directeur général de l'Essor, et administrateur à l'Uriopss Ile-de-France. DR

Gaël Escaffre cite aussi le cas d’un centre éducatif renforcé (CER) dont l’ouverture a été retardée de quelques jours : « Nous avons accueilli trois enfants (sur les huit initialement prévus), mais nous n’avons pas assez de travailleurs socio-éducatifs. Nous avons informé la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) que nous ne pourrons pas en prendre davantage... »

Administrateur à l’Uriopss Ile-de-France, le directeur travaille pour l’Essor depuis 20 ans : « Notre secteur a toujours eu des fragilités, notamment concernant les infirmiers, mais les tensions dans les ressources humaines (RH) se sont intensifiées en 2018. La crise sanitaire a été la goutte d’eau qui est venue faire déborder le vase. »

Tous les métiers

La pénurie touche tous les métiers. « Recruter des kinés ou des orthophonistes est très difficile depuis longtemps. Aujourd’hui cela relève du domaine du miraculeux ! La situation des infirmières et des aides-soignantes s’est très nettement aggravée, mais désormais le problème s’est étendu aux professions éducatives », confirme Guillaume Pelletier, directeur général de l’Apei de Chambéry qui comptabilise une soixantaine de postes vacants (sur 550) « sans compter les arrêts maladie qui sont légion actuellement ».

Même en milieu ouvert

Aucun champ du social et médico-social ne semble épargné, comme le souligne René Bandol, administrateur à Nexem et directeur général de l’Association régionale spécialisée d’action sociale d’éducation et d’animation (Arsea), en Alsace, qui gère des établissements et services dans les secteurs du handicap, de l’insertion et de la protection de l’enfance.