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Article26 mai 2020
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[Podcast] Des enfants placés et des éducateurs racontent leur confinement

Comment s’est déroulé le confinement dans les foyers de l’aide sociale à l’enfance (ASE) ? Dans le cadre de l'émission Les pieds sur terre, sur France Culture, enfants placés et éducateurs évoquent leurs difficultés.

Les visites des parents suspendues, les écoles fermées, des règles de distanciation physique imposées, de nombreux éducateurs en arrêt maladie… la crise sanitaire a compliqué le quotidien des enfants placés par l’aide sociale à l’enfance (ASE). Qu’ils soient accueillis en foyer d’hébergement, foyer d’urgence, studio ou famille d’accueil, comment ces jeunes ont-ils vécu le confinement sanitaire imposé en France entre le 17 mars et le 11 mai ? Comment leurs éducateurs ont-ils appréhendé cette situation exceptionnelle ?

Olivia Muller, productrice de l’émission Les pieds sur terre, sur France culture, a contacté des enfants placés et des éducateurs : ils racontent les conséquences du confinement sur leur quotidien dans « Confinement : avec les enfants en foyer » (à réécouter en podcast).

Tensions et régressions

Dans le foyer d’accueil d’urgence où elle travaille, qui accueille des enfants de 6 à 10 ans, Coraline, éducatrice spécialisée, se sent désarmée pour apaiser la souffrance et la violence exacerbées depuis le confinement : « Les enfants dans le groupe ne se supportent plus, ils manifestent des états de régression, il y a beaucoup de manifestations de violence physique ». Le contact avec les parents manque cruellement aux enfants : « Le soir au coucher, c’est compliqué », et plusieurs fois par jour, certains « pètent les plombs ». Elle ne peut faire face à cette demande accrue de réconfort, de contact physique et elle confie, à la veille du déconfinement : « Ça a été très éprouvant, je suis épuisée ».

Cocotte-minute

Pour les plus grands, l’agressivité et la violence se font aussi plus présentes depuis le confinement, comme en témoigne Nadia, 17 ans, placée en foyer dans les Yvelines : « C omme on est enfermés, on est tous irritables et le moindre petit truc part en bagarre ; il y a un jeune qui s’est fait étrangler, je pensais qu’il allait mourir ». De son côté, Arthur, éducateur en Bourgogne Franche Comté, rapporte : « On a un jeune qui, de colère, a frappé dans une vitre et s’est ouvert la main. C’est quelque chose que ce jeune-là n’a jamais fait. Les collègues sont en train de gérer une cocotte-minute ».

Solitude

Pour Marie, 17 ans, placée dans un studio en projet semi-autonomie, le plus difficile est de gérer la solitude induite par le confinement. Elle ne va plus à l’école et les éducateurs ne peuvent plus venir la voir comme avant, à cause du risque de contamination : « Je fais des rechutes de dépression quand je suis toute seule ». Arthur confirme : « Ça devient très dur » pour ces jeunes qui « ne sont jamais vraiment confrontés à cette solitude dans l’appartement » en temps normal. Dans leur studio, sans télé pour la plupart, sans Wi-Fi, quasiment sans contact avec les éducateurs, ils sont désœuvrés et perdent leurs repères.

Identité sociale

Si ne plus aller en cours génère de la solitude, cela représente aussi une perte d’identité sociale, comme l’explique Céleste, placée en foyer depuis octobre 2019 : « On est beaucoup à être très attachés à l’école parce qu’on n’est pas obligés de dire qu’on vit en foyer et qu’on a une histoire compliquée derrière nous. Ça nous permet de nous sentir inscrits dans la société ». Marie le souligne également : « C e qui me manque c’est de faire des allers et retours entre chez moi et le lycée, car c’était le moment où j’oubliais que je n’étais pas juste une gamine toute seule dans mon studio ».

« Ça ne me dérange pas trop »

Noé, lui, gère plutôt bien le confinement. À douze ans, placé en famille d’accueil, il avoue que ça l’ennuie de ne pas pouvoir sortir et aller voir ses amis, mais sinon, il admet : « Le confinement ne me dérange pas trop. Je fais du trampoline, et je construis une fourmilière. On a fêté mon anniversaire en mars, chez ma mère d'accueil. C'est embêtant de plus voir ma mère et ma sœur, mais je sais que je les reverrai ».

Et après…

Pour les jeunes qui étaient placés en foyer avant le confinement, mais qu’on a renvoyés chez eux à cause de la crise sanitaire, c’est l’après confinement qui risque de poser problème. Arthur craint que certains remettent en question la décision de placement, en disant : « Je n’ai pas le droit d’être chez ma mère alors que tout s’est très bien passé pendant les deux mois de confinement, alors je ne vois pas pourquoi je devrais retourner au foyer ». Le lien avec les éducateurs s’est forcément un peu détendu. « Est-ce que ces jeunes seront en capacité de revenir ? », s’interroge l’éducateur.

«  Confinement : avec les enfants en foyer », Olivia Muller, Clémence Gross, diffusé le 22 mai dans l’émission Les pieds sur terre, sur France Culture. Podcast disponible sur le site de France Culture.

Marie-HélèneKHOURI
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