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Article21 février 2020
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La mort d'Anne Voileau, précurseur dans le handicap

Elle n'était pas une figure très médiatisée, mais pendant trente ans, Anne Voileau a marqué profondément le secteur du handicap. Elle a créé un magazine, un lieu de formation pour les personnes handicapées, puis une radio. Elle vient de mourir et les hommages sont tous chaleureux.

« Je salue son engagement sans faille qui a marqué tous ceux qui l'ont côtoyée » (Sophie Cluzel) ; « Son engagement pour les personnes en situation de handicap fut exemplaire » (Pierre Deniziot, conseiller régional) ; « Nous saluons une femme au courage et à la force créatrice remarquables » (Jean-Pierre Demagny, Fondation OVE) ; « C'était ma petite sœur et parfois la grande » (Jacques Loiseau, co-fondateur de Vivre FM)... Depuis le 18 février, le fil Twitter est submergé d'hommages à Anne Voileau, décédée à 76 ans, comme ceux-ci, émanant de politiques, de journalistes, de militants associatifs et plus généralement de citoyens épris d'humanité. La première séance plénière du CNCPH ne s'y est pas trompée qui lui a rendu un hommage appuyé.

Une minute de silence lors de la dernière assemblée du CNCPH Michaël Couybes

Journaliste mais aussi mannequin

Anne Voileau, c'est un destin singulier. Tout le monde pense à ses réalisations dans le champ handicap, mais elle ne se résume pas à ses faits d'armes. « Depuis l'âge de 10-12 ans, raconte-t-elle dans un entretien en 2018 à Vivre FM, j'avais envie d'être journaliste. Pour moi, c'était d'être au cœur des choses, de défendre le faible, l'opprimé et la veuve et l'orphelin. » Une fois diplômée, elle se retrouve pendant 6-7 ans mannequin. « C'était une façon de lutter contre ma propre angoisse », disait-elle. 

Traiter tous les champs du handicap

Après cette expérience, elle retourne au journalisme, mais en dehors des grands titres. Elle crée une revue sur les minéraux dans lequel elle fait travailler des personnes handicapées. Et puis, c'est la grande aventure de la revue Être et handicap (devenue depuis Être). Elle innove profondément car son titre traite de l'ensemble des champs du handicap - quand les associations ont tendance à défendre chacune leur chapelle. Et elle poursuit dans son intuition en faisant travailler autour du magazine « valides »  et personnes handicapées, notamment psychiques. 

« Ne pas se protéger » 

Emmanuel Perret qui a pris son relais à la direction d’Être en 2012 a été frappé par sa démarche très personnelle. « Elle me disait : " Si tu veux aller dans la relation à l'autre, il ne faut pas se protéger, ne pas se mettre de barrière." » Avec les psychiatres, Anne Voileau a eu des échanges très animés : quand certains disaient que tel ou tel « malade » ne pouvait rien faire, elle le faisait venir à son « pôle de fragilité » pour lui permettre de mettre le pied à l'étrier. Autre nouveauté : la présence d'un magazine sur le handicap dans les kiosques. « Au début, les kiosquiers n'en voulaient pas car le handicap ne se montrait pas », raconte son successeur.

Une fréquence pour le handicap

Mais Emmanuel Perret avait déjà croisé Anne Voileau quelques années plus tôt. Cela se passait en 2004 au CSA où il travaillait alors. Une fréquence (93.9) avait été attribuée au handicap. Mais quel projet retenir ? Ce sera Vivre FM, un dossier défendu par Anne Voileau, jugé le plus rassembleur. C'est à ce moment que Vincent Lochmann va croiser sa route. « J'avais défendu un autre projet que le sien, mais elle m'a appelé pour rassembler les forces », explique celui qui sera longtemps rédacteur en chef de la station. Là encore, l'activité radio est associée à une démarche d'intégration professionnelle des personnes handicapées. 

Précurseur

Vincent Lochmann est admiratif des multiples facettes de la personnalité de la directrice de Vivre FM. « Il n'y avait pas de budget et Anne a trouvé des financements. Elle donnait beaucoup d'autonomie à ses équipes. Elle avait également beaucoup d'empathie avec les personnes handicapées. Ce qui ne l'empêchait pas de faire des blagues sur le handicap ». Il résume son rôle en un mot : précurseur.

Des nouvelles et de la poésie

Dans son entretien à Vivre FM en 2018 - alors qu'elle avait quitté la radio reprise par la Fondation OVE -, elle disait d'elle : « À chaque fois que je sors un projet, je me dis que cela va durer un mois, mais je le fais quand même. » Directrice pendant près de dix ans de la revue et de la radio, Anne Voileau trouvait malgré tout du temps pour écrire des nouvelles et de la poésie. 

« Elle était magique » 

« Je suis en deuil d'Anne », n'hésite pas à dire Marie-Anne Montchamp. L'actuelle présidente du Conseil de la CNSA l'a connue au moment du vote de la loi de 2005 sur le handicap. « Elle était très simple, jamais dans le discours et l'incantation. C'est quelqu'un qui faisait : une maker. » L'ancien ministre ne tarit pas d'éloges sur son amie Anne : « Ce n'était pas une politicarde. Elle était dans le vrai. Elle était magique ».   

NoëlBOUTTIER
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