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Article11 juillet 2019
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Le "droit de correction" tire sa révérence

La loi du 10 juillet 2019 relative à l'interdiction des violences éducatives ordinaires sonne le glas du "droit de correction" des parents sur leurs enfants. Cette mesure doit s'accompagner d'un renforcement de la politique de soutien à la parentalité, qui doit faire l'objet d'un rapport.

« On ne peut éduquer son enfant par la violence ». Tel est le principe qui sous-tend la loi relative à l'interdiction des violences éducatives ordinaires, publiée le 11 juillet 2019. Sa mesure phare : l'interdiction des violences physiques ou psychologiques exercées par les parents sur leurs enfants. En ligne de mire : les fessées, gifles et autres brimades et humiliations.

La Cnape - qui regroupe les associations de protection de l'enfant - « salue cette avancée majeure pour les droits et l'épanouissement de l'enfant ».

Ne plus distinguer violence légère et maltraitance

L'article premier de la loi dispose que « l'autorité parentale s'exerce sans violences physiques ou psychologiques ».

Cette disposition était-elle vraiment nécessaire ? Comme le relève l'exposé des motifs de la proposition de loi, les violences faites aux enfants sont actuellement clairement prohibées et sanctionnées par l'article 222-13 du code pénal.

Toutefois, la notion de « droit de correction », créée par le juge « sans aucun fondement légal », « suspend l'application du droit positif dans l'espace familial et éducatif ». Ainsi, le juge pénal, invoquant ce « droit de correction », renonce à sanctionner les parents auteurs de violences dès lors que celles-ci n'ont pas causé de dommage à l'enfant, sont proportionnées au manquement commis et ne présentent pas un caractère humiliant (Cass. crim., 29 oct. 2014, n° 13-86.371). 

Les magistrats se trouvent alors « face à une difficulté à juger la limite entre violence "légère" et maltraitance ; et à juger si l’acte en question était "à but éducatif" ou non. »

Désormais, cette distinction n'aura plus lieu d'être, la loi prohibant les violences physiques ou psychologiques quelles qu'elles soient.

Que sont les « violences éducatives ordinaires » ?

Cette notion recouvre les violences :

  • verbales : moqueries, propos humiliants, cris, injures... ;
  • psychologiques : menaces, chantage, culpabilisation... ;
  • physiques : fessées, gifles, pincements, secousses, etc.

Absence de nouvelle sanction

Cette prohibition des violences aux enfants ne s'accompagne d'aucune nouvelle sanction pénale à l'encontre des parents.

Les violences commises sur un mineur de 15 ans par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, sont déjà sanctionnées par 5 ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende par le code pénal.

Mais cette inscription au sein du code civil de l'interdiction explicite de toute violence « ne [permettra] plus à la jurisprudence de se retrancher derrière un attribut implicite de l'autorité parentale pour justifier l'invocation d'un "droit de correction" », explique la rapporteure de la proposition de loi pour le Sénat.

Respect des engagements internationaux

Avec cette loi, la France tient ses engagements internationaux, et notamment l'article 19 de la Convention des droits de l'enfant de 1989. Un peu à rebours, certes, puisque le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a rappelé en 2016, pour la 4e fois, à la France son devoir de mettre en pratique cet article et interdire explicitement les châtiments corporels, y compris au sein de la famille. Une recommandation qui avait été également faite par le Défenseur des droits l’année précédente.

Dispositions intéressant les assistantes maternelles

La loi rend obligatoire le suivi, pour les assistants maternels, d'une initiation à la prévention des violences éducatives ordinaires (VEO). Il s'agit de sensibiliser ces professionnels à cette question.

Cette mesure, ajoutée par les députés, avait reçu un avis défavorable de la commission et du gouvernement. Le Sénat rapporte ainsi les paroles d'Adrien Taquet, qui soulignait que « la prévention des violences éducatives ordinaires s'inscrit déjà dans la formation des professionnels en contact avec les enfants et les parents ». Il citait notamment « l'attention apportée aux besoins et aux facteurs de développement de l'enfant, conformément aux articles D. 421-46 et D. 421-47 du code de l'action sociale et des familles ».

Les sénateurs ont néanmoins voté cette disposition, l’inscription dans la partie législative du code de l'action sociale et des familles de la prévention des VEO dans la formation des assistantes maternelles ne pouvant pas faire de mal…

Renforcer le soutien à la parentalité

Enfin, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport présentant un état des lieux des violences éducatives. Ce document doit en outre évaluer les besoins et moyens nécessaires pour renforcer, d'une part, la politique de sensibilisation, d'accompagnement et de soutien à la parentalité à destination des parents et, d'autre part, la formation des professionnels concernés.

Pour la Cnape, « ces mesures de prévention et d'accompagnement marqueront une avancée décisive ».

Le rapport doit être remis d'ici le 1er septembre 2019. Autant dire que le gouvernement doit s'atteler à cette tâche dans les plus brefs délais, si ce n'est déjà fait !

VirginieFLEURY
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