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Article30 septembre 2020
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Grand âge : les médias font-ils bien le job ?

À la lumière de la crise sanitaire qui a multiplié les informations sur les Ehpad, le congrès des âges et du vieillissement a examiné les relations avec les médias. Permettent-ils une prise de conscience du grand public par rapport aux réalités du secteur du vieillissement ?

Pendant longtemps, le champ du vieillissement était dans l'angle mort des médias. En parler était très rare. Comme le raconte la déléguée générale du Synerpa, Florence Arnaiz-Maumé, « les médias ne parlaient des Ehpad que quand il y avait un fait divers. Depuis 2010-2015, les choses ont commencé à changer. » Avant cela, il y eut la canicule de 2003, un vrai choc, qui avait déjà permis d'entrouvrir les portes des Ehpad. Ces réflexions ont été au centre d'un débat le 29 septembre dans le cadre du congrès des âges et du vieillissement : « Comment les médias font-ils avancer le débat public ? » 

« Supprimer BFM TV » ? 

Philippe Wender, le nouveau président de Citoyennage Capture d'écran

Fraîchement élu président de l'association Citoyennage (voir encadré), Philippe Wender parle assez « cash ». La question des médias, raconte-t-il, anime toutes nos discussions. « Nous avions besoin, explique-t-il, de lever l'incertitude et de faire descendre l'anxiété. » À ce titre, il estime qu'il faudrait « supprimer BFM TV qui répète des messages anxiogènes. » Plus largement, il regrette que les médias aient si peu sollicité la parole des âgés. « Moi, j'ai été interrogé une fois par Le Monde et après, je ne l'ai plus été. »  

Contraintes de temps

Mais, la réalité du travail des journalistes est parfois difficile à appréhender. Spécialiste de la protection sociale à l'Agence France presse (AFP), Arnaud Bouvier raconte toutes les difficultés qu'il peut y avoir à recueillir la parole des âgés. Il n'est pas toujours simple de rentrer dans un établissement ; de nombreux résidents sont trop diminués pour pouvoir s'exprimer. Et puis, la plupart des journalistes travaillent dans des contraintes de temps qui ne leur permettent pas toujours d'approfondir les sujets.

« N'ayez pas peur des médias » 

Arnaud Bouvier, journaliste à l'AFP Capture d'écran
Pascal Champvert, président de l'AD-PA

Pascal Champvert qui s'exprime très souvent sur tous les médias, veut délivrer un message optimiste à la manière de... Jean-Paul II. « Exprimez-vous ! N'ayez pas peur des médias ! » Le président de l'AD-PA estime que si les médias peuvent avoir des contenus âgistes, c'est à l'image de la société. Pour autant, il est possible de faire avancer les choses en jouant la carte de la presse : « En mettant en évidence la situation telle qu'elle est, on peut faire bouger les choses », assure Pascal Champvert.

Préparer sa communication

Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa Capture d'écran

Mais pour être pleinement en phase avec les médias, les professionnels ont besoin de se former. La déléguée générale du Synerpa explique que son organisation a fait le choix de travailler avec l'agence Havas. « Avant, je ne pensais pas utile de consacrer des sommes d'argent à ce poste, explique Florence Arnaiz-Maumé. E t puis, je me suis rendu compte que la communication, ça se prépare. » Il n'est plus possible, selon elle, de participer à des émissions de radio ou télé sans avoir préparé son intervention qui va souvent se limiter à une ou deux minutes. Elle raconte, par ailleurs, que le Synerpa a mis en place à partir de fin mars et pendant tout le confinement, une conférence de presse par visio qui a été très suivie par les journalistes.

Faire bouger la société ?

Pour Arnaud Bouvier, que les organisations se dotent de services de communication est plutôt une bonne chose dans la mesure où on peut ainsi avoir un interlocuteur (1). Pour autant, il ne faut pas être dupe : « On essaie de nous vendre une vision des choses », analyse-t-il. Et le journaliste de l'AFP ajoute : « Notre rôle n'est pas de faire bouger la société. Mais si ce relais de la presse permet de le faire, tant mieux. »

Quelle réalité montrer ?

Guillaume Quercy, ancien président de l'Una Capture d'écran

Guillaume Quercy revient sur son expérience à la présidence de l'Una.(2016-2020). Il estime que « pendant la crise, beaucoup de journalistes ont souhaité faire plus de qualitatif. » Les acteurs doivent, avant de se tourner vers les journalistes, se demander quelle réalité ils veulent mettre en avant : « Si on montre les personnes dépendantes, on va nous dire que les vieux ne se résument pas à cela. Si on montre des personnes âgées en forme, actives, on nous dira qu'on est des bisounours. »

Garder la position de la bienveillance 

En termes de stratégie, il estime qu'il faut miser sur le sensible et tourner le dos au sensationnalisme. Attention à ne pas négliger la presse quotidienne régionale (PQR) qui peut être très influente. Guillaume Quercy enjoint les professionnels à ne pas être trop véhément et de « garder la position de la bienveillance. » Pascal Champvert insiste sur l'importance d'un message de vérité. « Si on dit la réalité du terrain, beaucoup de médias vont relayer notre message. » 

Plus jamais l'isolement !   

En tout cas, personne ne nie l'influence que peuvent avoir les médias. Philippe Wender est certain qu'ils « ont pesé sur le gouvernement, ont aidé à la prise de conscience, par exemple sur l'importance des visites en Ehpad. » Il revient sur l'isolement qu'ont connu les résidents pendant le confinement et s'exclame : « Plus jamais ça ! » 

(1) Ce qui ne garantit pas d'avoir un interlocuteur pour répondre à ses questions. Le Media social en a fait l'expérience à plusieurs reprises auprès d'un grand groupe du champ du vieillissement.

Citoyennage s'autonomise

Depuis plusieurs décennies, l'association de directeurs AD-PA soutient la démarche de Citoyennage qui vise à permettre une parole libre des personnes âgées qu'elles soient suivies par un service d'aide à domicile ou qu'elles vivent en établissement.

À l'occasion de ce 3e congrès des âges, les personnes âgées ont décidé de se constituer en association nationale en voulant notamment peser sur la loi Grand âge qui devrait voir le jour dans les prochains mois. Le premier président de Citoyennage est Philippe Wender (vivant dans le Val-de-Marne), mais les régions sont également représentées avec la trésorière Francine Serra (Hérault) et la secrétaire N. Petit (Côte d'Armor). 

NoëlBOUTTIER
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