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Interview26 mars 2020
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Didier Dubasque : « Le coronavirus ramène le travail social à l'essentiel »

Dans le confinement imposé par le covid-19, les accompagnements sociaux se réinventent à distance, par téléphone ou via les écrans. L’occasion, peut-être, de retrouver du sens, selon le co-animateur de la commission Ethique du Haut conseil du travail social.

Le département du Rhône vient de l’annoncer : il déploie des robots en Ehpad, pour que les résidents puissent communiquer avec leurs familles pendant la pandémie. Et dans le confinement actuel, des assistants sociaux, et des éducateurs de milieu ouvert, sont invités à accompagner par téléphone... Face au covid-19, les technologies de communication se généralisent-elles donc dans le travail social ?

Didier Dubasque C’est vrai, elles se développent partout ! Ici, un Ehpad met en place des appels vidéo par WhatsApp ou par Skype, pour maintenir le lien avec les familles. Là, ce sont des polyvalents de secteur qui y recourent… J’ai aussi découvert sur Facebook un groupe fermé de travailleurs sociaux qui échangent leurs propres infos sur le covid-19. Et des institutions sociales se mettent maintenant à fonctionner par visioconférence. Quant à mon propre blog sur le travail social, il atteint une fréquentation record, avec déjà près de 40 000 visiteurs pour un article sur les travailleurs sociaux « oubliés de la crise ».

Un « télé-travail social » est donc possible ?

DD Oui, cela fonctionne ! Evidemment, tout ne peut pas se faire à distance. C’est seulement en rendant visite aux familles que les polyvalents peuvent faire des évaluations et éventuellement alerter la protection de l’enfance. De même, pour une femme victime de violences conjugales, il va être difficile d’appeler au secours par téléphone dans le confinement.

Mais il faut bien trouver des solutions, face à cette menace totalement nouvelle, alors même que les problèmes sociaux n’ont pas disparu… Le confinement révèle d’ailleurs très fortement les injustices sociales. Mieux vaut s’enfermer dans un pavillon que dans un studio !

Dès lors, c’est un peu l’imagination au pouvoir... Et même si nous devons abandonner la proximité physique, cela ne nous empêche pas de développer une proximité sociale, notamment grâce au numérique. D’une certaine manière, le confinement peut même être l’occasion, pour les travailleurs sociaux, de se recentrer sur leurs fonctions principales.

Lesquelles ?

DD Les travailleurs sociaux ont déjà pour missions d’écouter et de rassurer. C’est particulièrement vrai aujourd’hui ! Et outre ce soutien moral et psychologique, le travail social consiste particulièrement, aujourd'hui, à protéger les personnes vulnérables, à assurer la vie quotidienne et l’alimentation, et à prévenir les violences intrafamiliales. La crise du coronavirus, au fond, nous ramène à ces quatre missions essentielles. On voit bien que d’ordinaire, les problèmes administratifs nous envahissent. Mais ce mois-ci, les droits aux prestations sociales vont être renouvelés automatiquement. Au fond, nous retrouvons le sens du travail social !

Quels conseils donner pour ce travail social en temps de confinement ?

DD Les conseilleurs ne sont pas les payeurs ! Je dirais, déjà, que les travailleurs sociaux ont le droit d’avoir peur face au coronavirus… La peur est positive, si elle rend prudent - mais négative si l'émotion l'emporte sur la raison.

Je donnerais au moins ce conseil : je crois qu’il faut renforcer son attention à l’autre. Téléphoner à une famille qu’on suit pour lui demander des nouvelles, ou discuter avec un sans-abri dans la rue, c’est déjà extrêmement puissant aujourd’hui. Et bien des travailleurs sociaux le font spontanément.

Au HCTS, vous co-animiez auparavant le groupe de travail « numérique et travail social », et vous avez récemment publié un guide sur ce thème. Que recommandez-vous aux travailleurs sociaux qui s’emparent du numérique ?

DD Avec le HCTS, nous avions voulu montrer que le numérique n’est qu’un moyen, et non pas une fin. Cette crise le montre très bien ! Les bons outils ne font pas les bons professionnels. Le numérique doit être au service des personnes. Il ne remplace pas le besoin de liens humains.

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OlivierBONNIN
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